Entre Héritage et Controverses
La question de l’appartenance géographique du Mont Saint-Michel est un sujet qui suscite toujours des débats passionnés. Cette perle architecturale dominant la baie au pied de ses remparts, représente depuis des siècles un symbole de richesse culturelle et d’histoires tumultueuses. Retraçons ensemble l’histoire mouvementée de ce site emblématique classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, entre Normandie et Bretagne.
Le Couesnon, cette frontière naturelle serait elle l’origine de la controverse ?
Et si cette controverse autour de l’emplacement, de l’appartenance du Mont Saint-Michel puisait ses racines dans les caprices du fleuve Couesnon, qui sert de délimitation naturelle entre la Normandie et la Bretagne. Certains soutiennent que le cours du Couesnon aurait même varié au fil du temps, au gré des marées, influençant ainsi la localisation actuelle du rocher. Il n’en est rien, l’histoire débute en 708, avec la fondation du monastère qui fait suite à plusieurs apparitions de l’Archange Saint Michel dans les rêves de l’évêque de la commune d’Avranches, un certain Saint-Aubert à qui il demandera l’édification d’un sanctuaire en son honneur sur le Mont Tombe. Les informations et mentions sur cet évêque fondateur du Mont sont rares, cependant il est possible d’observer la relique de son crâne exposée dans la basilique Saint-Gervais-et-Saint-Protais d’Avranches, commune du sud de la Manche. Notons qu’à cette époque, point de Normandie !
Un Passé Marqué par les Conflits Territoriaux entre Bretons et Normands.
Dès le Xe siècle, le Mont Saint-Michel devient le théâtre de conflits entre les ducs de Bretagne et de Normandie, chacun revendiquant sa souveraineté sur le site. Cette rivalité prendra fin, tout comme la domination bretonne sur le lieu, en 933 lorsque le duc Guillaume 1er obtiendra du Roi de France un agrandissement conséquent de son territoire avec l’intégration du Cotentin et de l’Avranchin, contrôlés alors par les Bretons. Le Monument historique est désormais normand et il le restera.
L’Influence de la communauté Bénédictines des Moines
En l’an 966, naît l’abbaye sous la direction de Richard 1er, duc de Normandie. Les moines bénédictins, venant de l’abbaye du village de Saint-Wandrille, prendront en charge le sanctuaire consacré à l’archange et remplaceront d’autres religieux présents au Mont Saint-Michel, accusés d’immoralité et d’impiété. La règle du conseil de l’église est stricte et impose chasteté, pauvreté individuelle et respect à l’Abbé en charge qui dirige l’Abbaye. Cette communauté contribuera à renforcer l’identité normande du Mont Saint-Michel. Ils feront de ce dernier une maison de prière et d’accueil qui deviendra l’un des hauts lieux du pèlerinage chrétien où les fidèles affluent pour demander salut et protection à Saint Michel. Malgré des périodes de domination bretonne pré-933, notamment avec l’abbatiat d’un Breton nommé Phinimontius, l’influence des moines bénédictins a joué un rôle crucial, déterminant et irréversible pour l’enracinement du Mont Saint-Michel dans la culture normande.
La Mainmise Normande au XIe Siècle sur le Mont Saint Michel.
Au XIe siècle, la Normandie affirme sa domination sur le Mont Saint-Michel, consolidant ainsi son contrôle sur le site. C’est à la fin de ce siècle qu’une église romane abbatiale est édifiée sur quatre cryptes, c’est une prouesse architecturale qui sera agrandie au XIIe siècle, marquant le début d’une ère de grandeur architecturale et spirituelle pour le Mont Saint-Michel. La construction de cette abbaye reflète non seulement la puissance politique des Normands, mais aussi leur engagement envers la foi chrétienne.
L’Intégration au Royaume de France
En 1204 s’ouvre une époque charnière où le Mont Saint-Michel devient une possession du royaume de France sous le règne du roi Philippe Auguste. Pendant cette reconquête, le Mont est ravagé par l’armée de Guy de Thouars, un Vicomte Breton qui influencera l’Abbé et les moines du Mont à organiser la création de fortifications pour se prémunir contre les invasions. L’intégration de la Normandie au domaine royal place désormais le monument sous l’autorité directe du roi de France, contribuant ainsi à son développement avec notamment la construction de l’ensemble gothique de la Merveille, couronnée par le réfectoire des moines et le cloître. La défense n’est pas en reste, les fortifications seront continuellement renforcées, la première tour sera construite et s’ensuivront beaucoup d’autres pour permettre au village du Mont Saint-Michel de résister pendant la guerre de Cent Ans. L’Abbé du monastère à cette époque est aussi le chef militaire !
Le Mont Saint-Michel Aujourd’hui
De nos jours, la merveille médiévale demeure un symbole de l’unité nationale française. Malgré les revendications cocasses occasionnelles émanant parfois d’un Breton ou d’un Normand, elle est administrativement rattachée à la Normandie et plus précisément au département de la Manche. Le Mont-Saint-Michel et sa baie incarnent un patrimoine commun à toute la France, célébrant son histoire et sa grandeur. Situé au cœur d’une baie, avec son territoire breton à l’ouest et normand à l’est, ce rocher est un lieu majestueux qui a été témoin des stratégies des ducs et des rois qui l’ont convoité.
Finalement, le Mont Saint Michel Bretagne ou Normandie ?
La question de l’appartenance géographique du Mont Saint-Michel, merveille de l’Occident, reste un sujet de débat passionné entre les Normands et les Bretons. Cependant, au-delà des querelles territoriales, il demeure un héritage précieux, témoignant de la richesse et de la diversité culturelle de la France. Le Mont Saint-Michel et sa silhouette majestueuse continuent de captiver les esprits et d’inspirer l’admiration, attirant environ 3 millions de visiteurs du monde entier au gré des marées chaque année et rappelant à tous l’importance de préserver et de célébrer notre patrimoine.
